Les “heu” et les “hmm” sont des parasites de la communication que la méthode Toastmasters aide à maîtriser
A chaque réunion Toastmasters, un des membres du club dénombre les hésitations (les heu ou hmmm) prononcées au cours de la réunion et rend compte de son score à chaque orateur. C’est souvent une surprise douloureuse, même pour les plus chevronnés. Car nous avons tendance à sous-estimer la quantité de nos hésitations.
Dans cet article, nous allons nous intéresser à l’impact des hésitations sur la qualité d’un discours et donner quelques recettes pour s’en débarrasser.
LES HÉSITATIONS AFFAIBLISSENT LA PAROLE
Indéniablement, les hésitations ternissent l’impact d’un discours. C’est ce qu’a démontré le psychologue américain Nicholas Christenfeld. Pour cela, il a soumis ses étudiants de l’université de San Diego à une expérience fort intéressante. Il leur a fait entendre un discours de quelques minutes contenant beaucoup d’hésitations, dans trois versions : l’originale et deux autres, manipulées numériquement.
Dans la première d’entre elles, les hésitations ont été remplacées par des silences. Dans la seconde, elles ont été purement et simplement retirées. En outre, il a donné la consigne à un tiers du public, avant l’écoute, de se concentrer sur le contenu du discours et à un autre tiers de se concentrer sur la forme du discours, le dernier tiers n’ayant pas de consigne particulière.
Après l’écoute, il a demandé à ses étudiants d’estimer le nombre d’hésitations prononcées et de donner une note à l’éloquence de l’orateur. Sans surprise, plus nombreuses étaient les hésitations, moins l’orateur était jugé éloquent. Plus surprenant, les étudiants étaient incapables de trouver laquelle des trois versions, l’originale, celle avec des silences et celle sans silence, contenait le plus d’hésitations. Ce ne sont que ceux qui avaient prêté explicitement attention à la forme du discours qui y parvenaient. Enfin, la version où les silences remplaçaient les hésitations donnait l’impression que l’orateur était encore plus mal à l’aise que dans la version originale, avec des hésitations.
S’ATTAQUER AUX CAUSES DES HÉSITATIONS
Pour expliquer ces paradoxes, Christenfeld a émis l’hypothèse qu’un processus inconscient évaluait les hésitations. Il en a conclu que pour améliorer son éloquence, il fallait les éliminer complètement et non pas seulement les remplacer par des silences.
Christenfeld partit alors à la recherche des racines du mal et mena d’autres expériences. Il montra notamment que l’excès d’attention portée par l’orateur au contenu de son discours provoquait l’hésitation. En particulier, un sujet abstrait, un vocabulaire riche ou un effort pour bien parler amènent l’orateur à se concentrer davantage et génèrent davantage d’hésitations.
D’autres causes d’une attention excessive sont la peur d’être jugé ou le fait de parler à quelqu’un d’intimidant. Il a d’ailleurs prouvé que les personnes sous l’emprise de l’alcool hésitent moins que les personnes sobres. Il en a conclu qu’étant moins inhibées, ces personnes se concentrent moins sur ce qu’elles disent. De même, parler sans interlocuteur, devant un interphone ou un répondeur par exemple, augmente également le nombre d’hésitations.
COMMENT LES ÉRADIQUER ?
Pour éliminer les hésitations, il faut donc éviter de trop se concentrer sur ce qu’on est en train de dire. Pour cela, plusieurs moyens existent. Un discours concret, par exemple racontant une histoire, ou l’usage d’un vocabulaire limité demandent ainsi moins d’attention. Par ailleurs, la pratique de l’improvisation permet d’automatiser la parole. Enfin, se concentrer sur d’autres éléments que le discours, comme le public ou sa propre gestuelle est également un moyen efficace.
L’un des orateurs les plus brillants que j’ai rencontré chez Toastmaster ne commettait aucune hésitation, même en improvisation. Il avait un secret. Enfant, Il avait appris le solfège et s’était entraîné à déchiffrer des partitions à haute voix avec un métronome. Se concentrer sur le rythme lui permettait de contrôler son débit.
POUR ALLER PLUS LOIN
Si les hésitations nuisent à la qualité de la communication, il existe donc des moyens pour s’en débarrasser. Chez Toastmasters, d’ailleurs, il est rare que les membres les plus expérimentés (“distingués” ou DTM) en commettent. Vous en doutez ? Venez donc nous rendre visite lors d’une de nos prochaines séances(lien).